Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
collectifdefenseaxesferroviairessudnormandie.over-blog.com

Ce blog sert de journal à notre collectif citoyen créé à Argentan (Orne) par des cheminots et des usagers pour la défense du service public ferroviaire dans le sud Normandie. Il rend compte des déclarations, des actions de ce collectif auprès de la population et des élus. Il présente aussi des réflexions pour la défense du service public.

UN AUTRE VIRUS MENACE LE SERVICE PUBLIC FERROVIAIRE : SA LIBERALISATION EN NORMANDIE COMME AILLEURS

UN AUTRE VIRUS MENACE LE SERVICE PUBLIC FERROVIAIRE : SA LIBERALISATION EN NORMANDIE COMME AILLEURS

Un autre virus menace le service public ferroviaire :

sa libéralisation !

 

Depuis plus de 30 ans, la construction européenne s’est faite sur le dogme de la « concurrence libre et non faussée » au nom de laquelle s’est organisée la destruction des services publics pour les offrir au marché, c’est-à-dire aux multinationales et à la finance régnant sur les différents secteurs de l‘économie.

Situation générale du ferroviaire

Une succession de « paquets ferroviaires » européens ont éclaté les différentes entreprises historiques en Europe. En France, la Loi d’Organisation des Mobilités (LOM) a été approuvée en 2019 ; elle a consacré l’éclatement de la SNCF en cinq sociétés anonymes autonomes, mettant en péril les fondamentaux des métiers de cheminots et les chaînes de commandements. Or, une société anonyme peut à tout moment ouvrir son capital. Cela, même si le gouvernement jure ses grands dieux que telle n’est pas sa volonté. Souvenons-nous des promesses sarkoziennes sur l’incessibilité des actions d’EDF pendant la campagne électorale présidentielle qui s’est conclue par l’ouverture du capital de l’entreprise publique de l’énergie après l’élection...

Aujourd’hui, l’endettement de la SNCF dépasse les 45 milliards. Dans ces 45 milliards, il faut compter la dette historique qui relève de choix non financés faits antérieurement par l’État. Après le conflit de 2018, le gouvernement s’était engagé en contrepartie de la casse du régime des cheminots et après d’après d’âpres négociations, au bout d’une lutte exemplaire de plusieurs mois, à reprendre près de 35 milliards cette dette qui en définitive lui revient.

Avec des pertes estimées à 8 milliards du fait de la crise sanitaire, cette situation menace l’ensemble de l’édifice. D’autant plus que l’État, propriétaire de l’entreprise, refuse d’apporter son aide, comme il l’a fait pour Air France, afin de compenser les pertes. Au contraire, la loi prévoit de faire supporter les investissements du Réseau par un abondement sur les résultats économiques notamment réalisés par l’activité voyageurs dont les TGV. Une situation d’autant plus dangereuse du fait que cette dernière accuse des pertes sèches en lien avec la diminution drastique du nombre de voyages et la suppression de la desserte de plus de 200 TGV au quotidien.

Qu’en sera-t-il avec les conditions économiques et le niveau d’endettement que va connaître le pays pour faire face à la pandémie ? Or, dans le plan de relance européen, il ne figure aucune ligne pour aider à la modernisation du réseau.

Le Ministre des transports avait fait une annonce de 4,5 milliards de travaux pour le réseau dont une partie couvre en réalité des chantiers déjà engagés. Par ailleurs, cette « aide » s’étend sur 4 ans et c’est surtout 3 milliards confiés aux géants du BTP, Vinci, Bouygues et Eiffage… de plus c’est loin de compenser tous les retards pris dans la dernière décennie.

L’entretien du réseau mis en péril 

Une convention avec l’État portée par Mr Morin, le président de région, participe par la différenciation du financement des infrastructures à la fin du réseau unifié…

Le rapport Duron, le rapport Spinetta et leurs différentes déclinaisons incluaient des niveaux de financement de l’État pour le réseau ferré qui s’avéraient incompatibles avec la politique d’austérité et le respect des principes de Maastricht imposant au pays d’avoir un déficit inférieur à 3% du PIB. Dans le même temps, plus de 100 milliards de cadeaux sont faits sans contrepartie aux entreprises et notamment aux multinationales, cadeaux dont la palme revient à SANOFI. A titre d’exemple, SANOFI a bénéficié au titre du CIR (Crédit Impôt Recherche) d’un crédit d’impôt annuel de 150 millions d’€. Ce qui sur 10 ans représente un manque à gagner de 1,5 milliard pour l’État. Au CIR s’ajoute le Crédit d’Impôt Compétitivité Emploi (CICE) qui de 13 millions en 2013 est passé à 24 millions en 2018. Dans le même temps, les effectifs passaient de 6300 à 3000 en 2017.

Mais un autre rapport plus insidieux a vu le jour : le rapport Philizot qui classifie les lignes par ordre d’importance et par le nombre et le tonnage cumulé des trains qui les empruntent au quotidien.

Ainsi dans sa lettre de mission, le ministre des transports résumait bien les enjeux : libérer l’État de ses obligations en matière d’entretien, de gestion du réseau et d’aménagement du territoire en faisant reporter sur les régions le choix des investissements ou pas et prendre les décisions de fermer « les petites lignes ».

« Toutes les possibilités devront être exploitées, sans tabou : redynamisation de l’offre grâce aux possibilités ouvertes par l’ouverture à la concurrence permise par le nouveau Pacte ferroviaire, baisse des coûts de travaux, mais aussi recours à d’autres modes ou à des solutions innovantes lorsque la pertinence du service ferroviaire existant n’est plus démontrée ». 

C’est bien dans cette logique que la Région de Normandie s’est engagée à faire voter mi-décembre un projet de convention avec l’Etat.

Résultat : 2 types de financement sont prévus et c’est bien cela qui menace l’avenir du réseau.

Les lignes plus importantes dites à caractère structurant bénéficieraient du financement de l’État avec une convention qui proroge les contrats de plan pour leur entretien. Il s’agit de Paris-Rouen- le Havre, Paris-Caen -Cherbourg et Caen-le Mans-Tours qui sont classées ligne à caractère national.

Les lignes de desserte fine du territoire, aucun projet de financement n’est prévu !

Paris Granville

Un statut non défini, sauf à bénéficier des financements prévus pour réaliser les travaux programmés pour les deux ans qui viennent et après..? 235 M sont prévus pour l’ensemble des lignes de desserte fine en Normandie : totalement insuffisant.

UN AUTRE VIRUS MENACE LE SERVICE PUBLIC FERROVIAIRE : SA LIBERALISATION EN NORMANDIE COMME AILLEURS

Quant aux autres lignes, leur parcours n’est même pas été évoqué.

Quel avenir pour Lison-Dol (axe Caen Rennes), Serquigny-Oissel (axe Caen-Rouen), Bréauté-Fécamp, Rouen-Dieppe etc.

Cette convention, comme d’autres signées en France, est une menace sur l’unicité du Réseau National. En temps de crise, les recettes fiscales de l’État et des Régions diminuant, le choix politique sera de réduire la voilure.

La finalité est de reporter sur les régions la responsabilité des choix stratégiques avec l’idée : d’objectiver les flux financiers » en clair rationaliser les investissements ou ne les engager dans la mesure où ils pourront être amortis.

 

Mais la perspective est surtout de laisser les régions assurer le choix de transférer vers la route pour laquelle elles ne supportent pas les charges d’infrastructures ou si peu pour le transport de voyageurs.

C’est bien cette volonté politique qui s’était exprimée lorsque Mr Morin avait décidé de transférer près de 12 trains sur la ligne Caen le Mans Tours vers des bus. Il ne faut pas oublier aussi l’épisode sur Caen Rennes ! le dimanche soir il fallait 800 km de bus pour remplacer un seul train. Bus qui continuent de rouler au quotidien avec deux ou trois arrêts entre Caen-le Mans et Caen-Rennes et dont la pertinence n’est pas avérée…

On sait que certaines associations d’usagers militent pour la privatisation et se font les chantres de l’ouverture à la concurrence, pensant à tort que ce serait mieux pour l’usager et que cela pourrait leur coûter moins cher… On a déjà l’exemple de la Grande-Bretagne où le prix du billet a explosé et plus près de nous la privatisation d’EDF avec une augmentation du prix de l’électricité de 43%...

Il faut rappeler que contrairement à la téléphonie où l’on peut choisir son opérateur, en matière de transport ferroviaire, l’usager du train n’aura que le seul choix qui a été fait pour lui. Comme par hasard, alors que les conventions d’exploitation signées avec la SNCF étaient signées pour 7 ans, dorénavant, avec les opérateurs privés, elles seront de 22 ans. Mieux ! Pour répondre à leurs exigences, le réseau est remis en état, les ateliers et le matériel neufs doivent être fournis avec le transfert des cheminots déjà opérationnels. Beau cadeau n’est-ce pas ? Et si cela ne marche pas, comme on l’a vu avec VEOLIA pour le fret ou comme pour les cars Macron, ces opérateurs pourront mettre la clef sous la porte ou se faire financer directement par les Régions et l’État, c’est-à-dire une fois encore avec l’argent des contribuables.

UN AUTRE VIRUS MENACE LE SERVICE PUBLIC FERROVIAIRE : SA LIBERALISATION EN NORMANDIE COMME AILLEURS
UN AUTRE VIRUS MENACE LE SERVICE PUBLIC FERROVIAIRE : SA LIBERALISATION EN NORMANDIE COMME AILLEURS
UN AUTRE VIRUS MENACE LE SERVICE PUBLIC FERROVIAIRE : SA LIBERALISATION EN NORMANDIE COMME AILLEURS

Caen-le Mans-Tours

Il est clair que sans la mobilisation exemplaire qui s’est manifestée par une grande action collective à l’initiative de notre collectif citoyen, on subirait déjà les affres de cette politique. Le paradoxe est que notre lutte a permis de garder cette ligne dans le réseau national. Mais le loup est déjà dans la bergerie, la Région Pays de Loire pilotée par une ultra libérale a fait le choix d’ouvrir cet axe par lots à des entreprise privées à partir de 2022. Une convention a été signée avec la Région Normandie pour permettre aux trains privés de circuler sur la partie normande. On comprend mieux les difficultés qui persistent en matière d’horaire pour répondre aux besoins des usagers. Besoins incompatibles avec une rationalisation des coûts en cas de transfert à des opérateurs privés. D’ailleurs ne nous a-t-on pas dit qu’ils ne pouvaient pas modifier les horaires avant 2022 : pour cause!

 

Caen Rennes

Même si des travaux viennent d’être terminés, cela n’assure en rien son avenir surtout quand on sait que la modernisation s’est traduite par la suppression d’une voie entre Avranches et Pontorson et un travelage (nombre de traverses au km) insuffisant pour faire passer des trains de marchandises. Situation qui hypothèque le développement de cette ligne au moment où le premier train vers le Mont St Michel-Pontorson a circulé et qu’il pourrait être envisagé un cadencement à la période printemps-été d’une desserte Granville-St Malo et Granville-Rennes pour étoffer la desserte du Mont St Michel.

 

Paris-Granville

Les annonces restent dans le flou au prétexte du fait que les enveloppes sont à déterminer dans un ratio d’une somme qui n’est pas véritablement évaluée.

Or, cette ligne n’est pas seulement une ligne touristique mais il s’agit bien d’une ligne structurante.

 

Globalement aucun projet d’avenir pour faire face à la nécessaire transition énergétique... ! Du point du réseau quel avenir pour les territoires bas-normand ?

Un autre aspect qui est significatif de la politique actuelle et des choix qui président à la Région se traduit par l’absence de plan de développement du réseau, de sa modernisation et de son électrification. Rien de prévu pour électrifier le chaînon manquant entre Oissel et Serquigny, rien sur Mézidon-le Mans, axe pourtant appelé à se développer notamment avec le Fret. Aucun choix politique stratégique pour intégrer la nécessité d’un report modal de la route vers le rail, malgré des infrastructures conséquentes laissées en friche (triage de Sotteville, des installations du Havre, de Mézidon, et d’autres gares multimodales ; Rouen, Argentan, Caen, Cherbourg etc.) en lien avec l’activité importante des ports de la Manche.

Tous ces enjeux restent au cœur des préoccupations et des actions de notre collectif citoyen. Accueil dans les gares avec des guichets ouverts à disposition des usagers, tarification dégressive et sociale, amélioration des horaires et création de trains pour mieux irriguer les territoires, actions pour préserver l’intégrité du service public, projets de modernisation avec la poursuite de l’électrification du réseau, innovation avec des matériel bi-mode (hydrogène et électrique) etc.

 

Voilà de quoi remplir la vie de notre collectif pour 2021.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article