17 Mars 2022
LES PAQUETS FERROVIAIRES
La politique européenne des transports ferroviaires est lancée en 1991 avec la publication d’une toute première directive 91/440/. Elle inscrit concrètement la séparation entre la gestion des infrastructures ferroviaires et l’exploitation des services, mais également l’instauration d’un droit d’accès aux réseaux ferroviaires nationaux pour les entreprises européennes de transport combiné et de transport international de marchandises. Ce droit d'accès doit être non "discriminatoire" (nous reviendrons plus loin sur la signification de ce terme).
Juste remarque concernant la directive 91/440 faite par un commentateur : cette directive n'a pas imposé la séparation organique des services. Il s'agit ici d'un choix du législateur français qui va donc plus loin que le texte du Conseil de l'UE.
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:31991L0440&qid=1657993225184&from=FR
Les directives européennes de libéralisation du rail au profit d'une "concurrence libre et non faussée" se déclinent suivant des ensembles de textes que l'on appelle des paquets ferroviaires
1er paquet : il concerne la libéralisation du fret ferroviaire, national et transnational. En France il est mis en application en 2006. Le Fret SNCF devant laisser des parts de marchés à d'autres opérateurs, qu'il s'agisse de filiales d'entreprises nationales comme DB Cargo ou d'opérateurs privés.
2ème paquet (2004) : voit l'émergence d'autorités de contrôle indépendantes dans les différents Etats européens. Leur rôle est de vérifier la mise en place de cette libéralisation
3ème paquet (2007) : concerne le transport voyageurs. Cet ensemble de lois acte l'ouverture à la concurrence du transport international de voyageurs (2010) avec possibilité de "cabotage" : droit est donné par l’Union Européenne à un transporteur européen non domicilié en France de réaliser un transport sur le territoire national, à la suite d’un transport international.
4ème paquet ferroviaire (2016) : il s'agit d'éliminer les derniers obstacles à la libéralisation du rail. L'objectif est de mettre en place une interopérabilité entre les réseaux européens. Pour ce faire, il ouvre le marché domestique à la concurrence selon différentes modalités (open access, appels d'offre) sur lesquelles nous reviendrons. Il fixe les conditions d’accès au marché ferroviaire européen des matériels roulants, des entreprises ferroviaires et des gestionnaires d’infrastructure. En France, (2018) il a pour conséquence le démantèlement complet de l'entreprise intégrée par la création d'un Groupement Public Unifié (GPU) constitué 5 entités qui sont des S.A. marquant ainsi leur passage en droit privé
Ci dessous le schéma du GPU SNCF
L'AUTORITE DE REGULATION DES TRANSPORTS
UN OUTIL MAJEUR DE LA LIBERALISATION DU RAIL
L'Autorité de Régulation des Transports (ART) est une autorité publique "indépendante" qui est chargée de la régulation économique des activités de transport ferroviaire, de transports urbains en Ile-de-France, autoroutier et aéroportuaire.
Elle exerce ses compétences dans le cadre des lois qui ont ouvert les transports ferroviaire, autoroutier et aérien à la concurrence. Elle veille donc à l'application des principes de la libéralisation des transports.
Un peu d'histoire :
En 2015, l'ARAFER (autorité de régulation des activités ferroviaires et routières) est créée par la loi dite Macron) remplace l'ARAF qui ne s'occupait que du chemin de Fer. Elle régule désormais le nouveau marché des transports réguliers interurbains en autocar, suit l'économie des concessions autoroutières, contrôle les contrats de concession et les conditions de passation des marchés.
En 2019, la Loi d'Organisation des Mobilités (LOM) transforme l'ARAFER en ART puisque désormais cette autorité intervient sur les trois modes majeurs de transport.
Une autorité "indépendante"
L'ART est une autorité indépendante dans la mesure où son indépendance est garantie par l'autonomie de fonctionnement de son collège par rapport à l'exécutif et l'autonomie financière.
L'autorité est constitué d'un collège dont le président est nommé par le président de la République et les deux vice-présidents respectivement par le président de l'Assemblée Nationale et celui du Sénat. Les quatre autres membres sont nommés par décret.
Remarque : on s'interrogera sur cette indépendance quand les membres sont nommés par le Président de la République et par les Présidents du Sénat et de l'Assemblée Nationale, tous acquis à la cause libérale .
L'action de l'ART
Sa mission première est de veiller au fonctionnement des activités concurrentielles et des tarifs de transport ferroviaire, de transport interurbain par autocar, des concessions autoroutières et des redevances aéroportuaires.
Pour ce faire, elle dispose de pouvoirs étendus d'investigation, de sanctions. Elle peut également régler des différends (par exemple entre une Région et une entité de la SNCF- dernièrement entre la Région Hauts-de-France et SNCF Réseau). Elle émet également des avis et des recommandations
Plus particulièrement concernant le transport ferroviaire, le cadre juridique dans lequel se situent ses missions est défini par les règlements européens concernant la libéralisation du rail et dont découlent les paquets ferroviaires et notamment le 4ème paquet d'ouverture à la concurrence voté sous ordonnance en 2018 par les Assemblées Nationale et Sénat.
Ainsi, elle juge si l'accès aux infrastructures est "non discriminatoire" et "équitable" pour tous les opérateurs, également appelés "clients". Elle donne son avis sur la définition des sillons, et des tarifs de péages, que SNCF Réseau, le gestionnaire de l'infrastructure, publie tous les ans dans le Document de Référence Réseau (DRR). Ce document est un catalogue des sillons mis à la disposition des entreprises ferroviaires. Il est accessible à tout le monde (publication sur le site SNCF Réseau)
A noter également, que l'ART est également consultée lors de la nomination du directeur de Gare et Connexions qui lui doit également des comptes.
Le dernier avis de l'ART porte sur le Document de Référence du réseau (partie non tarifaire)
L'autorité souligne les points sur lesquels elle a été particulièrement attentive
"Dans ce contexte (l’ouverture à la concurrence des services de transport ferroviaire de voyageurs NdE), le rôle de l’Autorité, dans le cadre son avis motivé sur le DRR, consiste, plus que jamais, à mettre en lumière, à partir d’un diagnostic complet et objectif, les éventuels freins et barrières à l’entrée et au développement du mode ferroviaire, susceptibles de compromettre l’accès et l’exploitation des opérateurs, historiques comme nouveaux entrants."
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* Sillon : créneau horaire de passage des circulations.
* Péage : redevance d'utilisation de l'infrastructure calquée sur les péages d'autoroute. La mise en place de cette redevance en juillet 1991 (directive de l'UE 90/140 - 1er paquet ferroviaire) signe la séparation entre l'exploitation et l'infrastructure de façon à permettre à terme la concurrence sur les rails entre les opérateurs. Ce qui sera le cas pour le fret, Fret SNCF devant céder des sillons à d'autres opérateurs et perdant ainsi des parts de marché importantes.
La loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire a adapté les pouvoirs de l'Araf (devenue l'Arafer le 15 octobre 2015, puis l'Autorité de régulation des transports le 1er octobre 2019) au nou...
https://www.autorite-transports.fr/connaitre-laraf-2/lautorite-apres-la-reforme-ferroviaire/
ETABLISSEMENT PUBLIC DE SECURITE FERROVIAIRE
L'Etablissement public de sécurité ferroviaire (EPSF) est un établissement public à caractère administratif, sous tutelle de la Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer, qui assure, en France, les fonctions d'autorité nationale de sécurité (des chemins de fer), telle que prévue par la directive communautaire n° 2016/798 du 16 juin 2016.
Le 27 juin 2018 est promulguée la loi afférente au 4ème paquet ferroviaire qui a précisé le calendrier d'ouverture à la concurrence européenne. C'est dans ce contexte qu'intervient L'EPSF, "compétent pour le système ferroviaire français, contribuant à l'interopérabilité des réseaux européens tout en assurant l'équité de traitement des acteurs" (c'est-à-dire l'accès au réseau ferré national aux opérateurs autres que la SNCF dans le cadre de la concurrence dite "libre et non faussée")
Distinct de l'ART qui joue un rôle de régulateur économique, l'EPSF veille à la sécurité ferroviaire proprement dite dans ce cadre concurrentiel.
Cependant, dans ses multiples fonctions, l'ART peut être saisie à l'encontre de décisions prises par l'EPFS
Un peu d'histoire
En 2004, la Communauté Européenne fait obligation de la création d'un Etablissement Public de Sécurité Ferroviaire. C'est la directive 2004/49/CE qui sera transposée en droit français en dotant l'EPSF de ressources propres en 2006. La taxe est codifiée dans le Code des Transports.
Ainsi, par la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports, l'EPSF est placé sous la tutelle du ministre chargé des transports. Toutefois le ministre chargé des transports ne peut demander au directeur général de l'EPSF un réexamen d'une décision intéressant la sécurité ou l'interopérabilité des transports ferroviaires qu'en cas de menace grave pour l'ordre public ou la continuité du service public.
En 2020, le Projet de Loi de Finances prévoit la suppression de certaines taxes par l'EPFS. A partir de 2021, la taxe est totalement supprimée et remplacée par une dotation de l'Etat. L'EPSF est placé sous la tutelle financière du ministre chargé du budget.
Cette ressource est complétée par les redevances payées à l'occasion de l'instruction de certains dossiers.
Un Etablissement Public Administratif
Autorité nationale de sécurité ferroviaire, L'EPSF est créé sous la forme d'un Etablissement Public Administratif (EPA)
Instances d'administration et de contrôle
Le Conseil d'administration
Un représentant de l'Etat choisi parmi les membres du CGED (Conseil Général de l'Environnement et du Développement Durable), Vincent Pourquery de Boisserin, élu président.
Cinq représentants de l'Etat
Deux parlementaires : un député et un sénateur
Deux personnalités qualifiées. A ce jour :
Deux représentants du personnel
Les instances de tutelle et de contrôle
L'action de l'EPSF
1- L'établissement délivre des autorisations nécessaires à l'exercice des activités ferroviaires au sein du système ferroviaire français.
Ces autorisations couvrent tous les acteurs du secteur ferroviaire, qu'il s'agisse des entreprises ferroviaires, des gestionnaires d'infrastructures, des organismes de formation, des demandeurs d'autorisations de véhicules, etc.
Le principe de ces autorisations est que le demandeur produit des dossiers exposant la façon dont il s'engage à respecter la réglementation de sécurité et à assurer la couverture des risques de sécurité particuliers liées aux activités et/ou aux matériels et installations objets de la demande.
2- L'action de l'EPSF se situe totalement dans le cadre des directives européennes d'ouverture à la concurrence et de l'interopérabilité des réseaux ferroviaires dans le but de réaliser "un espace ferroviaire européen sans frontières".
"Dans le respect de la pyramide des normes juridiques, le droit national intervient pour transposer les directives du Parlement européen et du Conseil, ou pour compléter et préciser le droit de l’Union. En ce qui concerne le système ferroviaire, la plupart des dispositions - lois et ordonnances - sont désormais codifiées dans le Code des transports et l’EPSF publie sur son site Internet l’ensemble de la règlementation applicable au secteur ferroviaire."
L’EPSF participe ainsi aux travaux menés par l’Agence de l'Union Européenne pour les Chemins de Fer.
Comprendre le positionnement de l'EPSF parmi les acteurs du système ferroviaire français https://securite-ferroviaire.fr/qui-sommes-nous/positionnement-de-lepsf-parmi-les-acteurs-du-systeme-ferroviaire ⬇
Contexte du système ferroviaire | EPSF
e paquet ferroviaire relatif à l'ouverture à la concurrence des marchés nationaux et à la gouvernance des acteurs du système ferroviaire. Également, la promulgation, le 27 juin 2018, de la lo...
https://securite-ferroviaire.fr/qui-sommes-nous/contexte-du-systeme-ferroviaire
Sources documentaires :
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