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Ce blog sert de journal à notre collectif citoyen créé à Argentan (Orne) par des cheminots et des usagers pour la défense du service public ferroviaire dans le sud Normandie. Il rend compte des déclarations, des actions de ce collectif auprès de la population et des élus. Il présente aussi des réflexions pour la défense du service public.

Lettre ouverte à Monsieur Morin, Président de la Région Normandie.

Lettre ouverte à Monsieur Morin, Président de la Région Normandie.

25 août 2022

Depuis sa création, notre collectif n’a cessé de vous interpeller sur les choix que vous avez effectués conjointement avec la SNCF pour fermer de nombreux guichets sur l’ensemble des axes normands. Choix guidés par des économies budgétaires, financés par de nombreuses pertes d’emplois, qui se sont avérés préjudiciables pour de nombreux usagers dont une part importante ne bénéficie pas d’outils numériques ou de moyens de paiement par carte bancaire. Au fil du temps la situation ne cesse de se dégrader.

Dans certaines villes comme Avranches et Villedieu les Poêles vous avez, en collaboration avec les mairies, proposé des services de substitution dans les syndicats d’initiative qui sont loin de donner satisfaction, eu égard aux services limités qui ont été proposés aux usagers, à l’époque, pour justifier la fermeture des guichets. Force est de constater que depuis, cette situation a évolué dans le mauvais sens puisque la vente physique n’est plus assurée dans ces lieux d’accueil. Ce qui pourrait se résumer à un marché de dupes. En effet, ceux qui ne peuvent avoir accès au numérique sont obligés de se rendre en voiture, soit à Granville soit à Vire pour acheter un billet avec un trajet qui peut atteindre 50 km. Question environnement, on fait mieux !

Cette situation se répète à l’envi pour les usagers d’autres gares.

Pour celle d’Argentan, les horaires d’ouverture le matin se font après le passage des trains. Depuis Juin, la réouverture a lieu le dimanche (forme de Flexi-guichet) selon les disponibilités du personnel sans pour autant qu’une communication ait été faite dans la presse sur cette nouvelle possibilité ou un affichage réalisé dans la gare. Manière de préparer une future fermeture en justifiant du manque de « chiffre d’affaires ». Annonce faite pour le guichet de la gare de Flers pour les années à venir…

Concernant Alençon, Préfecture de l’Orne drainant un bassin de plus de 50 000 habitants, le guichet est fermé totalement les week-ends et jours fériés. Certains jours connaissent une forte affluence et le guichet ferme bien que de nombreux usagers n’aient pu obtenir un billet. Ce qui amène à un sentiment d’incompréhension et de colère légitime que subissent injustement les cheminot-es.

Le guichet de Vire, quant à lui, connaît une activité en croissance en lien avec la hausse de fréquentation du nombre de voyageurs mais également, à cause du report d’usagers venant de gares où les guichets sont fermés dans le sud manche. Ce qui prouve le bien fondé d’un accueil physique.

Ainsi, nous voudrions vous citer des extraits du rapport de la défenseure des droits qui légitime d’autant notre action pour le maintien et la réouverture des guichets avec des horaires compatibles pour les besoins des usagers :

« Dans notre pays, chaque jour, des usagères et des usagers sont confrontés à l’impossibilité de faire aboutir une démarche administrative, se heurtent à une absence de réponse, peinent à contacter un interlocuteur ou trouvent porte close. Près d’un Français sur quatre exprime le sentiment de vivre dans un territoire délaissé par les pouvoirs publics

Rencontrent aussi des difficultés importantes les personnes âgées - encore souvent éloignées du numérique - les jeunes - moins à l’aise qu’on ne le croit avec l’administration dématérialisée - et les personnes handicapées - qui n’ont toujours pas affaire à des services publics accessibles. Enfin, les démarches numériques apparaissent comme un obstacle parfois insurmontable pour les personnes en situation de précarité sociale, alors même que ce sont celles pour lesquelles l’accès aux droits sociaux et aux services publics revêt un caractère vital…

La dématérialisation, telle qu’elle a été conduite jusqu’à présent, s’accompagne d’un report systémique sur l’usager de tâches et de coûts qui incombaient auparavant à l’administration. Portant atteinte au principe d’égal accès au service public, cette situation met également en danger notre cohésion sociale, notre sentiment d’appartenance commun, et fait courir le risque d’un affaiblissement de la participation démocratique, dans toutes ses dimensions…

Le développement d’un accès numérique aux démarches administratives constitue un progrès s’il s’accompagne de garanties essentielles pour l’ensemble des usagers, notamment le maintien systématique d’un accès alternatif et la possibilité d’un accompagnement suffisamment proche, compétent et disponible.

En réaffirmant les principes du service public – continuité, égalité, adaptabilité –, il existe bel et bien un chemin pour faire du numérique un atout pour notre pays.

Mais malgré cela, les travaux récents sur les phénomènes d’exclusion numérique estiment, aujourd’hui comme en 2019, à 13 millions le nombre de personnes en difficulté avec le numérique dans notre pays. Les laissés pour compte de la dématérialisation sont toujours aussi nombreux.

Des millions d’usagers n’ont tout simplement pas accès aux procédures dématérialisées, par défaut de couverture internet d’un débit suffisant, malgré les progrès sur ce plan, par défaut d’équipement ou de connexion

La Défenseure des droits ne peut que réaffirmer ce qui était écrit dans le rapport de 2019 : la dématérialisation ne sera pas un levier d’amélioration de l’accès de toutes et de tous aux droits si « l’ambition collective se résume à pallier la disparition des services publics sur certains territoires et à privilégier une approche budgétaire et comptable…

Points d’arrêt non gérés : les naufragés du rail dématérialisé

Saisie des difficultés rencontrées par des usagers pour acheter des billets de train, en raison de la suppression de guichets dans les gares et de la fermeture des gares elles-mêmes, la Défenseure des droits constate que la transformation d’un nombre croissant de gares en « Points d’arrêt non gérés » (PANG), c’est-à-dire de gares où les voyageurs ne peuvent acheter de billet avant de monter dans le train, empêche certains usagers de se procurer un titre de transport avant leur montée dans le train, particulièrement ceux qui ne sont pas équipés d’un smartphone. Dans certains cas, les usagers se voient appliquer, à bord du train, un tarif supérieur au prix d’achat du titre de transport proposé en gare ou en ligne, voire ont fait l’objet d’une verbalisation immédiate, qui reflète une logique de suspicion de fraude.

Dans ce contexte, l’absence d’alternative à l’achat de titres dématérialisés entraîne donc des difficultés particulières pour les usagers résidant dans des zones blanches ou grises – et paraît de nature à aggraver des inégalités territoriales préexistantes –, ainsi que pour certains usagers en situation de handicap.

En 2019 déjà, le Défenseur des droits avait alerté sur le fait que la numérisation des démarches conditionnait l’accès aux services publics à la capacité de l’usager à payer : coût de l’équipement et de l’abonnement…

L’illectronisme

Des fractures numériques qui ne sont pas résorbées. Une part importante de la population n’a pas recours aux procédures en ligne, et parmi celles et ceux qui y ont recours, 13 % sont en difficulté pour y arriver seuls. Selon le baromètre numérique Arcep/Credoc 202144, une personne sur 10 n’a pas d’accès à internet, et 35 % de la population rencontre, à un titre ou un autre, des difficultés pour utiliser les outils numériques. De même, 16 % des plus de 12 ans ne sont pas équipés en smartphone, mais avec de fortes variations : c’est le cas de 45 % des non diplômés, de 34 % des retraités, de 23 % des habitants des communes rurales, et de 41 % des plus de 70 ans

Il indique par ailleurs que 22 % des personnes ne disposent à leur domicile ni d’un ordinateur, ni d’une tablette. Là encore, le taux d’équipement le plus faible se retrouve chez les non diplômés, les habitants des communes rurales, les retraités, les plus âgés…

Si l’on regarde l’accès à internet à domicile, la situation est identique à celle de 2017 : 15 % des habitants n’ont pas de connexion internet à domicile.

Selon la même étude, 28 % des personnes s’estiment peu compétentes ou pas compétentes pour effectuer une démarche administrative en ligne…

Le guichet, le courrier postal, le téléphone, le service en ligne ou les courriels, selon sa situation, sa demande, ses moyens de communication, l’usager devrait pouvoir effectivement disposer d’alternatives équivalentes, non hiérarchisées ou priorisées, accessibles et qui n’induisent pas d’inégalité de traitement de la part du service public.

La procédure dématérialisée devrait devenir une alternative aux autres modes de communication, au libre choix de l’usager, et non un carcan imposé à tous. Dans cette perspective, les guichets ne seraient pas réservés à une catégorie de personnes considérées comme « incapables » de faire seules leurs démarches. L’accueil physique devrait faire l’objet d’investissements profitant à tous les usagers, dans leur diversité.

Concernant ces différentes analyses et remarques de la défenseure des droits sur la rupture d’égalité de traitement pour l’ensemble des usagers et les difficultés liées à la numérisation qui n’ont pas évolué favorablement depuis 2019, allez-vous continuer à maintenir des choix qui excluent une grande partie de la population de nos territoires ? Allez-vous également poursuivre dans cette direction, de ne pas respecter le pacte républicain et constitutionnel, qui doit garantir l’accès à tous au service public ferroviaire ?

En ce qui nous concerne, nous réaffirmons que le maintien et la réouverture de guichets là où ils existaient serait de nature à favoriser l’accès au train. Cela doit s’accompagner d’une tarification simple et claire, basée sur une dimension sociale et dégressive en lien avec la distance parcourue. L’ensemble serait de nature à favoriser le mode de transport certainement le plus écologique en ces temps de forts changements climatiques. De plus, cela contribuerait à améliorer la cohésion sociale et territoriale.

Le collectif citoyen est porteur d’un ensemble de propositions contenant la création de trains avec des horaires qui répondent aux besoins de tous les usagers, qu’ils soient du quotidien ou en lien avec les déplacements liés aux besoins économiques, touristiques et de loisirs.

Notre collectif reste disponible pour aborder l’ensemble de ses propositions et faire avancer la nécessité de développer les activités fret et voyageurs dans le cadre du service public en lien avec les régions qui se doivent être au plus proches des besoins des collectivités et des usagers.

Pour le bureau du Collectif citoyen de défense

des axes ferroviaires Sud Normandie,

Philippe Denolle,

Président

Dans la presse

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