Ce blog sert de journal à notre collectif citoyen créé à Argentan (Orne) par des cheminots et des usagers pour la défense du service public ferroviaire dans le sud Normandie. Il rend compte des déclarations, des actions de ce collectif auprès de la population et des élus. Il présente aussi des réflexions pour la défense du service public.
1 Décembre 2023
De plus en plus de voix s’élèvent pour exiger de favoriser l’accès au train pour des raisons environnementales notamment en baissant le prix des billets. Diverses solutions sont envisagées ! En ce qui concerne la Convergence Nationale Rail, depuis toujours, nous avons exigé une tarification sociale et dégressive en fonction du nombre de kilomètres parcourus. Rendre le train plus accessible, c’est exiger de l’Etat qu’il assure un financement pérenne des infrastructures à la hauteur des besoins en le faisant passer de 4 à 7 milliards par an. L’Etat doit également augmenter sa participation dans le prix des billets au titre de l’avantage écologique que représente le train eu égard aux économies réalisées en matière de coûts externes (externalités négatives) des transports et son incidence positive sur l’environnement, le climat et les finances publiques. Pour rappel, les transports sont responsables de 33% de gaz à effet de serre, le rail seulement 0,3%. La pollution coûte plus de 100 milliards par an à la société (rapport Sénatorial) et est responsable chaque année d’au moins 50 000 morts prématurées. Il est temps de faire les bons choix !
Récemment, la direction SA Voyageurs a annoncé que ses « clients » auront la possibilité de payer en 3 fois!
Forme d’aveu que la tarification est devenue top chère et de moins en moins accessible à certaines catégories « d’usagers ». En cette période de forte inflation où le pouvoir d’achat décroche pour la grande majorité des Français, le coût du transport est un élément non négligeable dans les dépenses des foyers. Voyager en train devient de plus en plus onéreux.
Paradoxalement, malgré le coût élevé, l’appétence pour le train ne cesse de grandir et cet été, un nouveau record a été battu avec plus de 24 millions de voyageurs transportés. La prise de conscience environnementale, jointe à un certain nombre de mesures commerciales aussi bien au plan national que régional, ont donné un nouvel élan à une plus grande fréquentation des trains. Preuve que l’aspect « prix du billet » est un élément déterminant.
En premier lieu, il convient de comprendre comment est défini le coût d’un billet dans le maquis tarifaire qui existe actuellement sur le territoire national.
L’usager qui achète son titre de transport sous quelque forme que ce soit ne voit que la marque SNCF et il est loin souvent de connaitre la complexité qui s’établit pour définir le prix d’un billet ou d’un abonnement.
En 2018, lors de l’établissement de la loi LOM, il a été défini une règle financière qui imposait à la SA Voyageurs en charge de gérer les TGV et les TET (Trains d’Equilibre du territoire) de dégager des excédents de gestion pour ne pas dire des profits afin de les réinvestir dans le financement du réseau. En clair, lorsque l’on achète un billet TGV, une partie est consacrée au péage du sillon facturé par SNCF Réseau (anciennement RFF), cela représente 40% du prix du billet, une autre partie va au remboursement des intérêts de la dette, puis à nouveau une autre partie va constituer la marge bénéficiaire pour financer le réseau et le reste pour l’amortissement, le coût d’entretien du matériel et les frais de personnel. Cette situation est le résultat du désengagement de l’Etat qui, malgré de grandes annonces, ne prend pas réellement en charge l’entretien du réseau et le fait supporter indirectement aux usagers et à un autre stade, par les régions et les « usagers contribuables ». Pour rappel, quand la France met 46 € par habitant dans son réseau, l’Italie en dépense : 103 €, la Grande Bretagne (pays libéral s’il en est) : 158€ et la Suisse : 414 euros!!
Pas étonnant que s’invite aujourd’hui dans le débat le coût des sillons pour faire baisser les prix !
Pour revenir aux 100 milliards qui devraient être investis dans le réseau d’ici 2040 : simple effet d’annonce qui n’a pour but que de tromper l’opinion publique. La dernière en date, le gouvernement vient de demander à la SNCF et donc à la SA Voyageurs d’autofinancer une partie des investissements. Le prix des billets va forcément continuer d’augmenter et la participation des collectivités aussi parce qu’elles sont mises à contribution avec une nouvelle incidence sur la fiscalité.
TGV Inouï, Le « yield management »
InOui est une offre premium avec plus de services à bord et un confort supérieur qu’il faut faire payer à une « clientèle plus aisée et souvent d’affaires ». Dixit la direction SNCF!
Directement hérité du modèle de l’aviation (American Airlines) ce système mis en service à la SNCF en 1993, consiste à faire varier les prix en fonction du taux d’occupation, de l’achat à l’avance ou à quelques heures du départ du train, des périodes de moindre ou fort besoin, début et fin de semaine, début et fin de journée et période de grands départs. Une telle complexité fait que dans le même compartiment, la grande majorité des usagers n’a pas payé son billet le même prix. A titre d’exemple : un couple avec deux enfants (11 et 15 ans) a payé 750 €, tout en bénéficiant de la réduction congés payés de 25%, pour faire Caen-Marseille, aller et retour, aux vacances d’Avril 2023. L’avion était moins cher….
Ouigo, le lowcost à la mode aviation!
TGV Ouigo est une offre avec des services réduits et un confort plus basique et depuis 2022, elle a été étendue à des trains classiques assurés avec des voitures Corail (Paris Lyon, Nantes Lyon), en France. D’autres sont en projet comme Paris-Bordeaux. Ce service est également lancé avec des TGV le 10 mai 2021 en Espagne, par le biais d'une filiale de droit privé. C’est une filiale rattachée à SNCF Voyages qui utilise les codes des entreprises privées
Les titres de transport ne sont disponibles qu'en ligne, sur le site officiel Ouigo, mais aussi les sites partenaires : SNCF Connect (principal site commercial de la SNCF), Trainline ou encore Kombo ; néanmoins, les billets « pourraient » également être achetés en agences de voyages.
Chaque bagage supplémentaire est payant au-delà d'une valise et d'un sac par passager (en outre, la taille maximale d'un bagage doit être de 55 × 35 × 25 cm). Les titres de transports sont contrôlés avant la montée dans le train.
A moins de 3 minutes le départ, le « client » est refoulé et ne peut prendre son train. L'utilisation de l'outil de production est maximisée : les trains circulent en moyenne 13 heures par jour, soit le double des TGV classiques, et sont entretenus uniquement la nuit avec des conséquences sur les équipements de confort et la propreté mais aussi avec des mises à disposition tardives ou par des suppressions, faute de rames de remplacement. Ne parlons pas des conditions de travail qui sont soumises à de fortes contraintes et ne sont pas sans conséquence sur la qualité de la production et donc la qualité du voyage. Il arrive que les rames ne soient pas nettoyées…
Les trains offrent 20 % de places en plus en supprimant la première classe et la voiture-bar, et en utilisant un type de sièges moins larges et cela avec le minimum de personnel. Forme de 3ème classe déshumanisée qui ne dit pas son nom et qui pourrait à l’avenir faire que les TGV Ouigo remplacent de plus en plus les TGV Inoui avec une diminution progressive de l’offre !
Particularité, les billets ne sont pas annulables et sont non remboursables.
A noter que l’offre en train classique Ouigo, si le temps de parcours est deux fois plus long que le TGV, permet pour de nombreux jeunes et autres familles de voyager à des prix attractifs en utilisant le réseau classique en parallèle des lignes TGV.
Un modèle qui renforce la discrimination numérique
D’où, les effets d’annonce pour des billets à « tarifs attractifs » ou, autres cartes de réduction qui ne touchent qu’un public restreint. C’est le cas avec SNCF Connect qui propose la carte Avantage jeune, adulte et senior à 24,50 euros au lieu de 49 euros. Cette carte est valable 1 an et concerne les billets pour la seconde classe des TGV INOUI et des trains Intercités. Pour en profiter, il faut pouvoir se rendre sur le site de la SNCF ou sur l’application SNCF Connect. Il est clair que cette offre est discriminante à l’égard de la population toute catégorie d’âge confondue (32% selon la défenseure des Droits) qui ne dispose pas de moyens numériques.
L’ouverture à la concurrence, une contraction de l’offre à venir !
« Cheval de Troie » du modèle capitaliste piloté par une Europe ultralibérale que n’ont cessé d’appliquer avec zèle les patrons de la SNCF (PEPY en tête) pour la mise en place à partir de 1990 des 4 paquets ferroviaires au nom de la concurrence libre et non faussée. Les gouvernements successifs qui, au prétexte d’améliorer le sort des usagers devenus clients, ont tout fait pour répondre à l’appétit des multinationales qui veulent grossir dans le domaine des transports pour de futurs profits à venir.
Dans la droite ligne de la politique gouvernementale, la FNAUT (fédération nationale des usagers des transports) après avoir réclamé la digitalisation et la numérisation des billets (sale coup pour les guichets) est très favorable à l’ouverture à la concurrence de toutes les lignes ferroviaires. L’un des arguments évoqués est la baisse du prix des billets et l’autre, plus de trains à disposition en raison de l’augmentation du nombre d’opérateurs... Chimère ! Déjà, le modèle existe dans l’entreprise avec le fret qui a été réduit à la portion congrue afin de réduire ses coûts pour être compétitif et l’on connait la suite ; avec un déclin continu des volumes transportés tous opérateurs confondus à moins de 10% au profit de la route à plus de 85% des volumes transportés… Aujourd’hui pèse une autre sérieuse menace, la disparition de l’entité FRET avec le « deal » conclu entre le ministre des transports et la commissaire européenne en charge de la concurrence, suite à une enquête ouverte par la Commission de l’UE au sujet d’aides financières qui ont été attribué à FRET SNCF pour maintenir son activité et qui seraient contraires au « sacro -saint » code européen de la concurrence!!. Quant au marché de l’énergie, on est à même de voir le résultat de la libéralisation du secteur sur nos factures d’électricité (+40 % en deux ans)!!
Au niveau des lignes TGV, le choix de la concurrence a mis fin aux coopérations entre réseaux ferroviaires nationaux par la stratégie de TGV Ouigo, une autre filiale de droit privé de la SNCF partie conquérir le marché espagnol. Conséquence, cela s’est traduit par une rupture brutale entre les deux entreprises et dans les faits, on assiste à une diminution de l’offre entre Perpignan et Barcelone où le prix des billets a explosé. Autre aspect, la RENFE (Entreprise ferroviaire publique Espagnole) va venir concurrencer la SNCF sur son réseau TGV.
La venue de TRENITALIA (Société publique des chemins de fer italiens) sur le réseau national a donné corps à une nouvelle stratégie des ultralibéraux qui préside aux destinées de l’ART (Autorité de Régulation des Transports), chargée d’examiner les dossiers des nouveaux entrants. En effet, au prétexte d’une distorsion de concurrence par l’avantage acquis de SA Voyageurs, ils ont décidé de baisser le coût des péages ferroviaires (droit d’accès sur le réseau…) pendant trois ans pour cette compagnie (37 % la première année, 16 % la deuxième et 8 % la troisième).
A ce jeu de Monopoly, il y a et il y a aura forcément des perdants ! Si on assiste à une baisse des prix sur les axes les plus fréquentés, voire en dessous des coûts d’exploitation, cela oblige à réaliser des marges par ailleurs ou à réaliser de nouvelles économies pour financer ces manques à gagner.
Ce jeu de la concurrence est également toxique car il oblige l’opérateur historique à actionner les économies sur les coûts d’entretien et notamment celui du personnel. Les pas de maintenance sont reportés à leur limite autorisée et les suppressions d’emplois constituent une autre variable d’ajustement qui se traduit par une production dégradée. En l’occurrence, ce sont les cheminots qui subissent les suppressions d’emplois et la dégradation de leurs conditions de travail. Pas étonnant qu’avec la fin du statut de nombreuses démissions ont eu lieu (2300 depuis début 2023 !!), en regard des salaires faibles, du manque de perspectives, donc une moins bonne attractivité des métiers!!. Situation qui intervient sur le temps et la qualité de la maintenance. Dernier des soucis de certaines associations d’usagers comme la FNAUT qui ne regardent que par le petit bout de la lorgnette pour s’en tenir qu’au prix et à l’offre et préfère vilipender la corporation des cheminots quand des actions sont menées pour obtenir les moyens nécessaires afin d’assurer correctement les missions de service public.
L’ensemble conduit à des dysfonctionnements qui font passer les nouveaux opérateurs pour de meilleurs prestataires… !!
Sauf à y regarder de plus près, comme on peut le constater, la SNCF forme un tout et, vu l’état de son réseau avec près de 12600 km de lignes “non circulées” ou “très peu circulées”, la bataille tarifaire pour se maintenir sur le secteur à forte densité de trafics est la porte ouverte à reporter sur les régions et sur les usagers des TER, les conséquences des manques à gagner. Une forme de péréquation négative ! L’Etat pourrait assurer la compensation mais c’est moins sûr. C’est une menace pour l’ensemble des dessertes fines du territoire qui restent à charge des Régions notamment celles qui ne bénéficient d’aucun financement de l’Etat pour leur entretien avec le risque de les voir disparaître, voire à un éventuel report vers la route.
Autre aspect de la concurrence, dans le cadre des appels d’offres, seules les lignes à « forts potentiels », celles jugées les plus rémunératrices, sont proposées aux nouveaux opérateurs à l’exemple de la Région PACA (Nice Marseille), en Région Val de Loire, en Normandie …
La tarification régionale
Chaque région définit sa stratégie en termes de TER sur son territoire. Cela comprend les trains mais aussi les bus. Elle concerne essentiellement les abonnés qui se rendent au travail et les étudiants et autres scolaires qui rejoignent leurs lieux d’études. Certaines régions décident de mesures spécifiques en fonction des catégories sociales (transport gratuit pour les demandeurs d’emploi) et des catégories d’âge. En Occitanie, le tarif SolidariO permet de bénéficier de 20 trajets gratuits valables 6 mois sur toute la région Occitanie ou de 75% de réduction sur les trajets liO Train. Cela s’adresse aux demandeurs d’emplois inscrits en catégories A B C D E de Pôle Emploi, aux allocataires du RSA (avec conditions de ressources), aux bénéficiaires de l’ASPA (minimum vieillesse), aux bénéficiaires de l’AAH (allocation adulte handicapé). Le 22/12/2023, la Région OCCITANIE va étendre son dispositif “gratuité d’usage” à tous les jeunes d’OCCITANIE âgés de 12 à 26 ans (21 lignes de trains et 370 lignes de cars concernées). Six fois plus de jeunes prennent le train depuis 2019. En 2015, 40 000 voyageurs prenaient le train, ce sont plus de 80 000 en 2023 : 108 000 voitures en moins sur les routes !!
La région Centre a également décidé la gratuité pour les étudiants, les scolaires et les apprentis… Cet été, la Région Occitanie a émis 1,5 million de billets à 1 € pendant les vacances, La Bretagne 250 000, les Hauts de France, 200 000 etc.
En Normandie, seuls les jeunes de moins de 26 ans ont pu bénéficier d’une réduction de 50% et un « pass » a été créé à 20€ en weekend à deux et à 35 € pour la semaine. Seuls les bénéficiaires d'un Quotient Familial (QF) ≤ 500 € CAF/MSA ainsi que pour les stagiaires de la formation professionnelle, élèves ou étudiants du sanitaire ou du social dont la formation est financée par la Région Normandie bénéficient d’un abonnement solidaire avec 50% de réduction. Il existe également un abonnement pour les jeunes de moins de 26 ans, avec une réduction de plus de 50 % (de 180 € à 270 € au maximum par an, au lieu des tarifs plein de 380 € à 980 €). Par contre les demandeurs d’emploi ne bénéficient que de billets à 75% de réduction pour se rendre à l’agence Pôle emploi. Pour un étudiant voyageant sur un parcours de 70 km, 20 jours par mois, cela lui coûte 68€…
Pour autant, l’offre tarifaire s’est étoffée de nombreux « produits » dont certains sont non remboursables. Il faut y ajouter l’introduction de la réservation obligatoire (1,70€), autre forme d’augmenter le prix des billets et en 2023, la hausse du prix des billets et des abonnements a été de 7%. Tout dernièrement l’ouverture à la concurrence en Normandie pour les bus a vu TRANSDEV (filiale de la Caisse des Dépôts et Consignations) gagner le marché avec comme conséquence , l’arrêt de la vente des billets bus + train dans les gares, l’ arrêt de l’affichage et la fin des correspondances en cas de retard conduisant ceux qui le peuvent à acheter leur billet de bus sur un site dédié plus un billet en guichet ou sur SNCF Connect. En haute Normandie la fin de la tarification sociale pour les cartes « vermeille » a vu les tarifs exploser de 3470%....
Comme on peut le constater, la tarification régionale dépend essentiellement de choix politiques qui engendrent des disparités territoriales importantes.
La mise en place des communautés d’agglomération
Elles ont également un statut d’autorité organisatrice lorsqu’elle dépasse 50 000 habitants.
C’est un nouvel étage de la fusée puisque ces nouvelles entités ont vocation à être AOM (autorité organisatrice des mobilités). Elles définissent la stratégie en matière de transport et notamment la tarification des différents modes sur l’ensemble des communes qui les composent. Un exemple parmi tant d’autres : la communauté urbaine de Cherbourg (178 000 habitants) a décidé une tarification de 1€ pour tous les bus et les trains circulant sur son territoire. Cela s’applique pour les usagers utilisant le train jusqu’à Valognes. Cependant, la ville voisine CARENTAN et son agglo (23000 habitants) ne peuvent pas disposer des mêmes droits et les usagers sont obligés de payer le tarif normal pour se rendre à Cherbourg.
La discontinuité territoriale
L’ouverture à la concurrence engendre également la remise en cause de certains droits acquis en termes d’accès au train. Pour ne citer que la Région PACA, depuis l’ouverture à la concurrence sur la ligne Nice Marseille et le choix de prendre TRANSDEV (largement abreuvé de dizaines de millions d’€), elle a mis fin aux tarifs sociaux et maintenant, les usagers devenus clients doivent s’acquitter du plein tarif. Fin de la carte vermeille et autre carte jeune !
Sur la Région Normandie, la reprise à son compte de l’ensemble des trains TET au départ des gares parisiennes, maintenant transformés en TER, ne permet plus aux usagers de bénéficier des opérations nationales de vente de billets à prix réduit. De plus, pour un usager ayant un titre de transport notamment combiné avec un parcours en TGV, en cas de retard d’un train en provenance de Normandie, s’il ne peut prendre son TGV, il est obligé d’acheter un nouveau billet…Cette disposition est également valable en cas de retard d’un TGV + un train vers la Normandie à l’exception de ceux qui sont munis d’un billet Flex beaucoup plus cher.
Les autres doivent racheter un nouveau billet et s’ils ne le font pas, ils se font taxer d’une amende de 100€ en plus du prix du billet à acquitter.
Lors d’un achat d’un billet TER par un usager au départ d’une gare d’une région qui va emprunter un parcours composé d’un voyage TGV ou d’un parcours TET avec la dernière partie du trajet en TER, le guichet de la gare origine ne peut délivrer un billet comportant la dernière partie du parcours sur l’autre région concernée. L’usager est obligé de reprendre un billet lors de son arrivée au terminus du TGV ou du TET avant de terminer le parcours en TER et, s’il ne possède pas de moyens numériques de paiement ou du temps disponible pour acheter son billet, il est considéré comme un fraudeur et doit s’acquitter au minimum d’une surtaxe de 10€ !!!
Une tentation politique de copier le modèle allemand.
Sous la pression de certains politiques, il est demandé d’aller vers un tarif mensuel de 49€ pour encourager à préférer le train à la voiture. Sur le fond, cela ne remet pas en cause le principe même de l’ouverture à la concurrence, cause de la détérioration du service public. Si l’intention est louable, c’est loin de convenir à l’ensemble des usagers. En effet, seuls les parcours comprenant les TER, le RER, le métro et les bus à l’exclusion des TGV et des TET seraient concernés et cela s’adresse en particulier aux transports du quotidien qui concernent surtout les salariés, les scolaires et les étudiants. Déjà, pour la grande majorité, les titres de transports sont pris en charge à 50 voire à 75% par l’employeur. C’est là le risque de voir les entreprises être partiellement exonérées de s’acquitter de leur versement transport.
Il est clair que ceux qui voyagent de manière occasionnelle sur de longs parcours pour raisons personnelles ou touristiques en empruntant TER, TET et TGV, se trouveraient exclus d’un tel dispositif et pour autant, ils continueront de payer plein tarif leur billet voire plus cher pour compenser les manques à gagner, autre forme discriminante remettant en cause le droit au transport pour tous. On estime à près de 3 milliards d’€ le coût d’une telle mesure. Mesure que le gouvernement ne prévoit pas de financer tant le futur budget 2024 est fait d’économies à réaliser dans l’ensemble des services publics et donc d’une dégradation de leurs conditions d’accès. Autre contradiction, la dernière demande du gouvernement, de faire supporter dans le prix du billet TGV et TET et à la « SA Voyageurs », le coût de futurs investissements dans les travaux de régénération de voies et de modernisation des installations. Une fois de plus, une opération de communication du ministre des transports !!!
D’ores et déjà plusieurs régions (Normandie et PACA) ont dit qu’elles s’opposeraient à cette solution et ne sont pas prêtes à mettre la main à la poche, déjà trop occupées à favoriser l’arrivée de nouveaux entrants qui vont exiger de nouvelles dépenses budgétaires…
L’Espagne a décidé de rendre les trains régionaux gratuits pour lutter contre les effets de l’inflation à la fin du dernier trimestre 2022. Cette mesure a été étendue en 2023 et a permis d’augmenter la fréquentation de 30%. En compensation l’Etat a versé 700 millions à la RENFE.
Pour l’instant le gouvernement français n’a fait aucune annonce, si ce n’est que des mesures de bricolage budgétaire!
Propositions de la Convergence Nationale Rail pour des billets accessibles à tous les usagers.
En premier lieu, il faut avant tout changer de paradigme et prendre les dispositions pour revenir à une entreprise publique intégrée avec une nouvelle loi d’orientation des transports qui confie la gestion et l’exploitation du réseau à une seule entité comme le permet le cadre juridique européen, quoiqu’en disent les libéraux.
C’est le choix de la Belgique et bien d’autres pays qui reprennent en gestion publique des activités ferroviaires confiées préalablement au privé. Ce qui permettrait de mettre un coup d’arrêt au démantèlement de Fret SNCF pour lequel, le ministre des transports a mis au point un plan de « discontinuité économique » avec la commissaire européenne en charge de la concurrence qui s’apparente à un plan de casse, devant être impérativement stoppé !!Au-delà de l’aspect environnemental, le développement du fret ferroviaire est un élément essentiel et indispensable pour participer à l’amortissement du financement des infrastructures et à leur modernisation.
L’autre aspect, c’est de revenir à une entité unique pour l’ensemble des offres de transport « voyageurs » avec une tarification homogène pour l’accès au TGV en mettant fin aux deux niveaux de confort actuel (Ouigo et Inoui) pour que le confort et la qualité du transport soient offerts à tous. Et pour cela, il faut rouvrir les guichets dans les gares avec du personnel qualifié pour garantir un accès équitable à tous les usagers et supprimer les taxes et autres amendes lorsque les billets sont pris dans les trains pour les usagers de bonne foi.
L’avion qui pollue 85 fois plus par passager que le TGV est pourtant exonéré de TVA et en plus ne paie pas la TICPE (La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) sur le kérosène. D’où notre exigence de la suppression de la TVA sur tous les billets de trains. Mesure sociale et écologique s’il en est !
Pour les TET comme pour les TGV, la règle qui doit s’appliquer est celle de la tarification dégressive en fonction du nombre de kilomètres parcourus en y incluant une dimension sociale pour rendre effective la possibilité de voyager sur de longues distances en train. Nul ne peut être exclu du droit au transport et des dispositifs doivent être mis en place pour les jeunes, les retraités et pour les catégories sociales disposant de faibles moyens ou se trouvant dans l’exclusion, en généralisant et en harmonisant au plan national des mesures qui existent dans plusieurs régions et financées par l’ETAT.
Concernant le billet « congés payés », il faut le faire passer de 25 à 50% de réduction et sans conditions d’utilisation.
Quant a à la tarification régionale, il convient de définir une concertation avec les régions pour aller vers une harmonisation des tarifs abonnements avec une réelle participation de l’Etat pour rendre le train du quotidien plus attractif en activant également le versement transport/versement mobilités comme source de financement et notamment en mettant à
contribution les entreprises qui bénéficient du transport pour développer leur activités commerciales et leurs profits( grande distribution, parcs de loisirs, banques et assurances…).
Comment financer ces mesures
Cela passe par une fiscalité juste et écologique qui supprime les exonérations de TVA et de TIPCE dont bénéficie l’avion, de même pour le transport routier également exonéré de TVA et qui bénéficie d’un remboursement partiel de la TICPE (de l’ordre de 18 € par hectolitre de gasoil) en ne supportant pas les coûts externes du transport, de l’ordre de 5,90 € par passager par km/avion et 4€ par km /poids lourds (données ministère écologie). Sommes pouvant être estimées au minimum entre 15 et 20 milliards d’€.
A l’instar de la Belgique et d’autres pays européens, les poids lourds, à partir de plus de 3,5 t, s’acquittent d’une redevance kilométrique pour l’utilisation du réseau autoroutier, des 4 voies et de certaines routes nationales, elle va de 0,064€ pour les moins de 12T (critère 5) jusqu’à 0,23 € pour les véhicules supérieurs à 32T. Elle s’applique à tous les véhicules y compris étrangers (donc français) et sert à financer l’entretien du réseau. Déjà, pour commencer, en appliquant ce principe aux poids lourds étrangers en transit, à titre d’exemple ; un véhicule de plus de 32 t traversant la France uniquement que par les nationales et les 4 voies pour se rendre en Espagne au départ de Calais devrait s’acquitter au minimum de 230€. Multiplié à l’envi par des millions de poids lourds étrangers qui empruntent le réseau français, permettrait de collecter quelques milliards qui, reversés à l’Agence de Financement des Infrastructures en France (AFIT) serait également une nouvelle source pour financer l’entretien et la modernisation du réseau ferroviaire public.
Le coût total annuel de l’insécurité routière est de 38 mds d’€ et rappelons que celui de la pollution est estimé à plus de 100 milliards avec un bilan de 50 000 morts prématurées par an selon une enquête sénatoriale. Investir dans le train et le rendre accessible au plus grand nombre, c’est à terme préserver des vies et faire des économies à long terme tout en diminuant la pollution indispensable pour agir efficacement contre le réchauffement climatique.
La CNR avec d’autres forces revendique la renationalisation des concessions d’autoroutes et la généralisation du versement transport/versement mobilités à toutes les régions.
Cet ensemble de mesures permettrait de dégager les financements nécessaires au niveau de l’Etat pour assurer à la fois l’entretien, la régénération, la modernisation du réseau et intervenir de manière conséquente en accroissant l’aide aux régions pour le développement des transports du quotidien. Cela permettrait également de financer de manière conséquente les mesures sociales (billets congés payés, cartes jeune et vermeille, AAH) pour les personnes en situation de précarité, et donc de faire sérieusement baisser le prix du billet de train en le rendant accessible à tous en rentrant dans le cercle vertueux de répondre aux enjeux environnementaux qui s’imposent en raison du changement climatique. Il s’agit d’un véritable enjeu de démocratie sociale et écologique ! Un vrai choix de société !!