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Ce blog sert de journal à notre collectif citoyen créé à Argentan (Orne) par des cheminots et des usagers pour la défense du service public ferroviaire dans le sud Normandie. Il rend compte des déclarations, des actions de ce collectif auprès de la population et des élus. Il présente aussi des réflexions pour la défense du service public.

Quel avenir pour les 9000km de petites lignes ferroviaires ? Budget et technologie. Tribune.

Quel avenir pour les 9000km de petites lignes ferroviaires ? Budget et technologie. Tribune.
Quel avenir pour les "petites" lignes ferroviaires (9000km) ?
 
A chaque fin d'année, ressurgit cette question à l'occasion du vote du projet de loi de finances auquel appartient le programme 203 des transports et celui de l'Agence de Financement de l'Infrastructure des Transports (AFIT)
 
Or, dans la session précédente, l'utilisation du 49.3 a permis de faire passer à la trappe la proposition, pourtant votée  par les députés à  l'Assemblée Nationale dans le cadre du Projet de Loi de Finances (PLF) 2023, d'abondement du budget de la SNCF de 3 milliards d'€ dés l'année 2023.
 
Cette année, on nous promet monts et merveilles avec un budget "aux avant-postes de la planification écologique". Mais nous n'oublions pas que le budget de SNCF Réseau, depuis le dernier contrat de performance en avril 2022, a été fixé à 2,8 milliards par an ce qui  est nettement insuffisant au regard de la tâche à accomplir si l'on veut mettre le réseau à niveau. Il ne sera abondé de 1,7 milliard de plus qu'en 2027.
 
D'ores et déjà, en Commission des Finances de l'Assemblée nationale réunie en session pour discuter du projet de loi de finances 2024, des députés Nupes ont déposé des amendements visant à améliorer le budget consacré au transport ferroviaire. Ces amendements ont été adoptés par la Commission le 26 octobre 2023. Nous sommes donc en attente de ce qui sera décidé dans l'hémicycle.

Adopté le jeudi 26 octobre 2023 en commission des Finances, cet amendement propose d’étaler sur plusieurs années le financement de la modernisation du réseau, et propose un investissement de 1,5 milliard d’euros pour l'année 2024.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1680C/CION_FIN/CF586.pdf

 
Parallèlement, le gouvernement continue de communiquer sur les "trains légers".
 
Quels objectifs réels à cette orientation des trains légers ?
L'adoption de trains plus légers permettrait "une économie à l'acquisition, et surtout une économie à la fois en exploitation et régénération des voies", selon Jean-Baptiste Djebbari, qui a évoqué des factures 30% moins chères environ.
🔸Or les experts ferroviaires ont tous la même réponse : avant de se poser la question de la taille du matériel, il faut savoir ce qu'on veut faire de la ligne et comment on va l'exploiter, définir la capacité nécessaire, la fréquence, le confort, la vitesse, le BUDGET...
On ajoutera qu'avant de se lancer dans des projets assez fumeux et coûteux au final, il est urgent de s'atteler à sa régénération et de faire rouler ce qui doit y être aussi bien pour le transport voyageur  que pour le fret.
Ces trains légers qui économiseraient les voies sont par ailleurs moins stables que des trains plus lourds selon les experts.
L'ancien ministre argumentait qu'on avait trop massifié le transport ferroviaire notamment pour le fret aujourd'hui disparu (sic !). "Ce train léger pourrait rouler sur des lignes plus rustiques, comme une partie des 1.000 kilomètres dont l'État entend céder la gestion aux régions".
 
Nous sommes toujours et encore dans une logique de désengagement de l'Etat et de démantèlement  du réseau, les lignes investies par ce matériel fonctionnant de façon indépendante.
 
Cette orientation confirme qu'il n'est pas question pour les autorités de prendre à bras le corps la régénération du réseau ferroviaire dont l'âge moyen est de 30 ans, les lignes dites "petites" dépassant cette moyenne. Leur préoccupation première est de réduire les coûts d'entretien et de personnel. La France étant le pays d'Europe qui investit le moins par habitant pour son réseau (voir schéma ci-dessous)
 

A comparer avec l'investissement pour la route : depuis 25 ans, la France a investi 2 fois plus dans la route que dans le rail. Elle vend maintenant Fret SNCF à la découpe.

 

Désengagement de l'Etat et démantèlement du réseau.

Le rapport Philizot, le "Devenir des lignes de desserte fine des territoires", sur lequel s'appuient désormais toutes les décisions, préconise de compartimenter les lignes en trois blocs.

- le premier composé d’une "petite partie" des lignes relevant du réseau dit structurant, qui seront financées à 100% par SNCF Réseau, sous réserve de l’exécution des conventions de financement déjà signées. Le coût devant être pris en charge par le "contrat de performance" négocié en catimini en avril 2022 (1);  
- le deuxième composé de la majeure partie des lignes, qui resteront cofinancées dans le cadre des contrats de plan État-régions, le taux de participation de l’État pouvant être modulé en fonction de l’importance des lignes ; les financements "seront identifiés dans le cadre des contrats de plan État-région 2015-2020, dont le volet Mobilités est prolongé jusqu’en 2022, puis au travers d’un nouveau contrat qui déclinera l’ensemble des priorités identifiées et financées dans la LOM [loi d'orientation des mobilités]" ; 
- le troisième composé des lignes prises intégralement en charge par les régions – possibilité ouverte par l’article 172 de la LOM qui dispose que les "lignes d’intérêt local ou régional à faible trafic du réseau ferré national peuvent […] faire l’objet d’un transfert de gestion […] au profit d'une autorité organisatrice de transport ferroviaire" –, ces dernières pouvant en confier la gestion à des acteurs privés.

Dans ce cadre d'ailleurs, l'article 9 de la loi 3DS votée en 2021 autorise une collectivité  à demander le déferrement d'une ligne non circulée pour la transformer en voie verte (sujet qui fera l'objet d'un article).

(1) contrat de performance très insuffisant de 2,8 milliards € alors qu'il faudrait a minima 1 milliard de plus pour améliorer le niveau du réseau.

C'est dans ce contexte, et celui d'un contrat de performance très insuffisant pour remettre le réseau à niveau, qu'il faut comprendre l'option des trains légers propulsé par le gouvernement (comme celle de la voiture électrique)

"Dans le cadre du plan d'investissement France 2030, ces projets de trains de nouvelle génération et de systèmes ferroviaires adaptés, qui visent notamment les petites lignes, seront soutenus à hauteur de 75 millions d'euros" a déclaré au mois de février 2022, devant le Sénat, l'ancien ministre délégué aux transports, spécialiste des start up.

👉 Les investissement dans ces projets sont évalués à 165 millions €, bien moins que le budget demandé par JP Farandou qui considère qu'il faut 100 milliards € sur 15 ans (soit 6 milliards par an) pour remettre le réseau à  niveau. Le contrat de performance signé entre l'Etat et SNCF Réseau est à l'heure actuelle de 2,9 milliards c'est-à-dire très insuffisant selon les dires même de l'Autorité de Régulation des Transports (ART).
 
Des Appels à Manifestation d'Intérêt (AMI) ont  été lancés dès mars 2022.
 
Les cinq premiers projets sélectionnés dans le cadre du Plan France 2030 :
- Train léger innovant, mené par la SNCF avec ces partenaires industriels (CAF, Texelis, Thales, Alstom, etc.) associant aussi le Ferrocampus de la région Nouvelle-Aquitaine, à Saintes (Charente-Maritime) qui servira de centre d’expérimentation et de laboratoire. L'échéance de mise en circulation du système est prévue à l’horizon 2029. L’objectif est de réduire de 30% les coûts totaux du système pour une desserte donnée.
 
 
- le système Draisy, mené par la SNCF, dans le Grand Est et les Hauts-de-France avec l’industriel Lohr et des PME comme IBS pour les batteries et Stations-e pour les systèmes de recharge électrique dans les gares, repose sur un train modulaire de 30 places assises (80 voyageurs maximum) de la taille d’un bus. Cette solution est destinée aux petites lignes ou tronçons de lignes à faible trafic. Elle vise à diviser par deux le coût du transport ferroviaire au voyageur.km et pourrait équiper à terme entre 40 et 80 petites lignes. 1ères expérimentations en 2024 sur une petite ligne pilote en région.
- le système Telli est également opéré par la SNCF, pour 60 à 80 personnes. 
Les autres projets mettent en scène des startups
 
- Écotrain, mené par Stratiforme, soutenu par la région Occitanie, et mené en partenariat avec des industriels dont Socofer, et avec l’école d’ingénieurs IMT Mines Telecom : système de navettes autonomes ferroviaires légères de 30 places alimentées par batterie à énergie solaire (voir article). Deux types de navettes sans conducteurs seront développées sur une base technique commune, "micro fret" et "passager". L’objectif : un coût d’exploitation plus faible dû à l’automatisation du service. Ecotrain n’a pas vocation à remplacer l’offre de la SNCF, mais à la compléter
- Flexmove, mené par Akka Technologies et la Sicef (Société d’ingénierie, de construction et d’exploitation de la ferromobile) avec Alstom et Systra, et l’université Gustave-Eiffel. Un démonstrateur est prévu en Occitanie. Service de mobilité à la demande censé permettre d'emprunter la route comme le rail lors d’un même trajet. Il s'agit d'un véhicule automobile électrique, avec des développements et équipements spécifiques permettant de l’adapter aux exigences de la circulation sur rail, notamment aux passages à niveau. Circulation en conduite autonome sur le trajet "rail" et piloté, comme une voiture classique sur la route. Niveaux de fréquentation espéré jusqu’à 2.000 voyageurs par jour.
 

Il convient d'ajouter Taxirail qui a obtenu une enveloppe de l'ADEME qui lui a alloué la coquette somme de 13 millions d'euros.

La société est déjà assurée de bénéficier du soutien actif de la riche agglomération Caux Seine, proche du Havre, seule collectivité à avoir intégré le consortium réuni autour du projet.

La société a signé une lettre d’intention avec une filiale de la SNCF baptisée Akiem spécialisée dans la location de trains. « Elle va nous apporter son expertise technique, notamment sur la maintenance », se félicite Régis Coat, président de Taxirail SAS et d’Exid C&D.

- La signalisation : SIG4LDFT, mené par Alstom à Saint-Ouen et Villeurbanne pourrait être à testé avec le projet Train léger innovant sur le Ferrocampus de Saintes. Signalisation automatisée pour les lignes de desserte fine du territoire, tout en respectant également les contraintes d’interopérabilité du réseau. L’objectif principal du projet : diviser par deux les coûts de déploiement d’une solution de signalisation et de diminuer d’au moins un tiers les coûts d’exploitation et de maintenance de celle-ci par rapport à une solution traditionnelle. Les gains attendus résultent de la diminution de moitié du nombre d’équipements de signalisation à la voie, que ce soient les balises de communication train/voie ou les détecteurs de circulation de train, de l’utilisation du réseau de télécommunication publique existant en remplacement des réseaux de communication dédiées GSM-R et fibre optique, de la réduction des équipements embarqués à bord du matériel roulant et de celle du personnel d’exploitation grâce aux fonctions de conduite autonome.
 
Dossier de presse train léger

 

 

Voyage à Bessèges : un film à voir si vous ne l'avez pas déjà fait.

Un réalisateur suisse apprend que la voie ferrée qu’il empruntait avec ses parents pour se rendre dans les Cévennes, a été abandonnée. Il décide de refaire le voyage, comme avant, en train, ou à pied. Un railmovie et une enquête rondement menée sur l’état du réseau ferroviaire français.

Manuel Lobmaier, réalisateur suisse, apprend que la ligne ferroviaire qu’il empruntait enfant, pour rejoindre sa maison de vacances dans les Cévennes, a été fermée.

Il fait le pari de refaire le même voyage en empruntant uniquement les lignes de train autres que les lignes de TGV. Il part de son village natal, en Suisse et emprunte avec une facilité déconcertante une ribambelle de trains. Pas d’attente dans les gares, des correspondances à l’heure, des trains toutes les 1/2 heures. Un jeu d’enfant.

À peine passe-t-il la frontière française que son voyage se transforme en parcours du combattant : voies en travaux, trains annulés, gares fermées, prix des billets exorbitants.

Quand enfant il mettait 15h et 31 minutes pour rallier Bessèges, il lui faudra aujourd’hui 11 jours et une certaine dose d’acharnement pour arriver au terminus qu’il s’est fixé dans le Gard.

Avec lui nous découvrons non seulement la scandaleuse histoire du démantèlement ferroviaire français, politique à contre-courant des ambitions écologiques actuelles, mais aussi et surtout des paysages à couper le souffle au rythme lent et rassurant des trains de notre enfance.

Texte : France 3 Occitanie

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